intoxicated by you
À l’abri derrière l’objectif de la caméra, Coby guette le moindre mouvement du journaliste qu’il peut apercevoir au travers de sa lentille. Il appréhende chacun de ses gestes, chacun de ses déplacements. Il zoome, il recadre, ajuste et corrige à l’aide de la multitude de boutons à sa disposition. À l’abri dans la noirceur du studio d’enregistrement, le caméraman peut se permettre de respirer plus librement. Nul besoin de penser, de réfléchir. Il ne fait qu’agir, écouter les ordres balancés par la production et le réalisateur, exécuter les modifications qui s’imposent. Le tout, dans un automatisme presque réconfortant. Parce qu’il n’y a pas de place dans sa tête pour ce boulot qui occupe la majorité de ses journées. Il a plutôt l’impression que son cerveau surchauffe, à force de continuer se rejouer ses erreurs passés. Un passé conjugué au présent, tant il est à proximité.
Le soulagement s’empare de lui lorsqu’un retentissant – Coupez! – résonne sur le plateau. L’homme en profite pour se redresser, déliant les muscles de son dos et de ses bras que les longues heures de travail éreintent. Une pause s’impose d’elle-même alors que l’heure du repas est annoncée, lui laissant plus ou moins une heure pour se tourner les pouces. Si auparavant, il profitait de cette petite heure pour rendre visite à sa belle qui occupait l’un des bureaux d’un édifice voisin, les excuses sont font désormais trop nombreuses afin d'éviter de se retrouver en tête en tête avec sa fiancée. La culpabilité au fond de la gorge et l'estomac dans les talons, c'est vers son bureau qu'il bifurque plutôt que la salle commune, ayant cet urgent besoin de s'isoler un moment. Ses collègues étant sur le terrain, il devrait y avoir la paix pour un temps. Même si cette notion est somme toute inexistante dans sa vie, désormais.
Marchant dans ce couloir vide, le regard errant, c’est sans vergogne qu’il percute une employée de la chaîne au détour d’un couloir. D’instinct, ses mains retiennent la femme afin de lui éviter une chute, et déjà, sa voix s’élève, gorgée d’excuses. – Je suis vraiment, vraiment désolé! Je ne… – Mais il s’interrompt, alors que ses yeux croissent ceux de l’autre, un regard pétillant qu’il reconnaîtrait d’entre milles. Mikye. – Mais qu’est-ce que tu fais ici? – C’est à peine un chuchotement qui traverse ses lèvres, alors qu’il ne peut s’empêcher de scruter les environs, guettant les allées et venues de ses collègues qui pourrait possiblement les surprendre ensemble.